dimanche 15 mai 2011

Le Silmarillion - J.R.R. Tolkien


Le Silmarillion, J.R.R. Tolkien, édition établie et préfacée par Christopher Tolkien, traduit de l'anglais par Pierre Alien, éd. Presses Pocket, 1984. [Christian Bourgeois, 1978]

"Le destin s'abattit par surprise sur les Humains le trente-neuvième jour après le départ de la flotte. Des flammes jaillirent soudain de Meneltarma, un grand vent s'éleva en même temps qu'un vacarme venu de la terre, le ciel bascula et les montagnes se renversèrent. Númenor s'enfonça dans la mer, aves ses femmes, ses enfants, ses jeunes filles et ses fières dames, avec ses jardins, ses palais et ses tours, ses tombes et ses richesses. Tous les joyaux, toutes les étoffes, les peintures et les ciselures, le rire et la gaieté, le savoir et l'histoire, tout disparut à jamais. A la fin une vague haute comme une montagne, verte et glacée, empanachée d'écume, vint recouvrir la terre et prendre en son sein Tar-Míriel, la Reine plus pure que l'argent, l'ivoire ou les perles. Elle voulut trop tard escalader les pentes du lieu sacré sur le Meneltarma, les eaux l'emportèrent et son cri se perdit dans les hurlements du vent.
Amandil parvint-il à Valinor, Manwë écouta-t-il ses prières ? En tout cas, les Valar épargnèrent à Elendil, à ses fils et à son peuple le sort de Númenor.
(...)
Plus tard, Elendil et ses enfants fondèrent des royaumes sur les Terres du Milieu. Leur savoir et leurs talents n'étaient qu'un écho lointain de ce qu'ils étaient avant que Sauron ne fût venu à Númenor, mais ils parurent immenses aux sauvages qui parcouraient le monde. Beaucoup de récit racontent les exploits des héritiers d'Elendil sans les temps qui suivirent et de leur lutte avec Sauron qui n'était pas finie.
Car Sauron lui-même fut terrorisé par la colère des Valar et la ruine infligée par Eru sur la terre et sur la mer. C'était beaucoup plus qu'il n'avait espéré, voulant seulement la mort des Númenoréens et de leur orgueilleux monarque. Sauron, assis sur son trône noir au centre du Temple, avait ri en entendant les trompettes d'Ar-Pharazôn sonner pour annoncer la bataille, il avait ri en écoutant le tonnerre et la tempête, il avait ri encore à ses propres pensées, rêvant à ce qu'il allait faire dans un monde débarrassé pour toujours des Edains, et au milieu de son rire son trône et son temple plongèrent dans l'abîme. Mais Sauron n'était pas fait de chair mortelle, et si la forme sous laquelle il avait fait tant de mal lui fut arrachée et qu'il ne put plus jamais paraître aimable aux yeux des hommes, son esprit s'échappa du gouffre, passa comme l'ombre d'un vent sinistre sur la mer et regagna les Terres du Milieu et Mordor, sa demeure. Il retrouva ses remparts de Barad-dûr et y resta sombre et muet jusqu'à ce qu'il se fût donné une apparence nouvelle, l'image même de la haine et du mal, et rares étaient ceux qui pouvaient soutenir le regard du terrible Sauron.
Mais cela ne fait pas partie du récit de la Submersion de Númenor, dont tout a été dit."

p.366-368

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