dimanche 19 septembre 2010

L'Enchanteur - R.Barjavel


L'Enchanteur, René Barjavel, Folio Gallimard, 2005. [Denoël, 1984]

"Nous ne pouvons pas imaginer comment il était assis sur son pommier. Non pas sur une branche, mais sur le pommier lui-même en son entier. C'était un pommier de taille normale, et Merlin se présentait sous les proportions normales d'un être humain. Il était pourtant assis sur le pommier, et bien à la portée de la voix et des regards de ceux qui s'adressaient à lui, et qui n'avaient pas besoin, pour ce faire, de crier ni de lever la tête. Il nous faut donc faire comme eux, admettre le fait sans nous préoccuper du comment : il était assis sur son pommier... Eux ne se disaient pas que ce qu'ils voyaient était impossible : c'était possible puisqu'ils le voyaient... Et ils ne s'étonnaient pas non plus de voir Merlin mordre toujours dans la même pomme, craquante et juteuse, dont n'aurait dû rester depuis longtemps que la queue. On ne s'étonnait de rien devant l'Enchanteur : tout lui était naturel. Et on n'éprouvait ni fâcherie ni dépit si tout à coup il disparaissait : on savait qu'il était parti s'occuper de la Table Ronde, ou secourir quelqu'un qui n'avait pas eu la force de venir à lui et dont il avait entendu l'appel, même s'il n'avait pas été appelé. On s'asseyait sur la mousse en attendant son retour, et on cassait la croûte. Il y avait des pommes pour tout le monde."

p.177-178

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